Le lait sur la sellette ?

Une alimentation riche en produits laitiers est habituellement recommandée en prévention de l’ostéoporose. Le lait contient en effet de nombreux nutriments essentiels, dont le calcium, le phosphore et la vitamine D qui ont un intérêt particulier pour le squelette.

Mais ces recommandations pourraient être de l’ordre des idées reçues, si l’on en croit une étude publiée par le British Medical Journal. L’objectif en était de déterminer si une consommation élevée de lait était associée à une réduction de l’incidence des fractures et de la mortalité. Elle a porté sur environ 100 000 personnes dont une majorité de femmes. Ces dernières, âgées de 39 à 74 ans à leur entrée dans l’étude, ont été suivies sur une vingtaine d’années tandis que les hommes quant à eux, âgés de 45 à 79 ans au démarrage, ont été suivis pendant 11 ans  en moyenne. Tous avaient répondu à un questionnaire évaluant notamment leur consommation de lait et de produits laitiers.

Pendant les 20 ans de suivi, 15 541 femmes sont décédées et 17 252 ont présenté une fracture du col du fémur. Du côté des hommes, 10 112 dont décédés et 5 066 ont présenté une fracture du col fémoral.

Les résultats sont assez surprenants puisqu’il apparaît que le risque de mortalité est presque doublé pour les femmes qui boivent 3 verres de lait par jour ou plus (Hazard Ratio [HR] 1,93 ; intervalle de confiance à  95 % [IC] : 1,80 à 2,06). A chaque verre de lait supplémentaire correspond une augmentation de 15 % de la mortalité chez les femmes. Les hommes buveurs de lait ne sont pas épargnés, bien que la hausse par verre de lait apparaisse plus modeste pour eux (3 %).

Préférer le fromage…

La consommation de lait ne semble pas améliorer non plus le risque de fracture dont aucune réduction de l’incidence ne se manifeste chez les gros consommateurs ou plutôt consommatrices, puisque, pour chaque verre de lait supplémentaire apparaît, chez les femmes seulement, une augmentation, modeste, du risque de fractures en général (HR 1,02 ; IC : 1,00 à 1,04) et de fracture du col fémoral en particulier (HR 1,09 ; IC : 1,05 à 1, 13). D’autre part, une association positive est retrouvée entre la consommation de lait et la concentration urinaire de 8-iso PGF1α, un biomarqueur du stress oxydant, et le taux d’interleukine 6, un autre biomarqueur, de l’inflammation cette fois.

En revanche, la consommation de produits laitiers autres que le lait (fromages ou produits fermentés), est associée chez la femme et chez l’homme, à une réduction du risque de fractures et de décès.

Les auteurs incriminent le D-galactose, présent à des concentrations largement supérieures dans les produits laitiers non fermentés et qui agirait par l’intermédiaire du stress oxydatif et de l’inflammation. Ils mettent toutefois en garde contre une interprétation trop rapide de ces résultats, le caractère observationnel de cette étude laissant la place à l’intervention de possibles facteurs confondants qui n’auraient pas été identifiés.

Dr Roseline Péluchon

RÉFÉRENCES
Michaëlsson K et coll. : Milk intake and risk of mortality and fractures in women and men: cohort studies. BMJ 2014; 349: g6015